“Comment parler du racisme aux enfants”, les bons mots pour le dire
Par Bénédicte Flye Sainte Marie
La journaliste Rokhaya Diallo propose une version actualisée et enrichie de l’ouvrage qu’elle a publié il y a douze ans, au sein duquel elle donne des clés pour échanger de manière claire et posée sur la notion de racisme avec les plus jeunes, âge par âge, et montrer comment les attitudes discriminatoires s’enracinent dans l’histoire et dans la structure globale de nos sociétés.
Sauf rares exceptions, personne ne se proclame ouvertement raciste. Et portant en étendard nos valeurs d’humanité et de tolérance, nous sommes à peu tous certains de ne pas l’être... Mais celui que Le Petit Larousse définit comme une “idéologie fondée sur la croyance qu'il existe une hiérarchie entre les groupes humains, autrefois appelés « races” “ est pourtant intrinsèquement inscrit dans la manière dont fonctionne notre monde moderne. C’est ce qu’illustre Rokhaya Diallo dans ce petit livre, utile à bien des égards. L’éditorialiste au Washington Post, qui vient par ailleurs de terminer une résidence d’études sur le genre à Georgetown aux Etats-Unis, nous explique d’abord que, loin de remonter à la nuit des temps, le racisme est né avec la colonisation, afin de justifier l’asservissement d’un peuple sur un autre, au nom d’une prétendue supériorité. De légitimer aussi toute l’horreur de l’esclavage. Ce qui n’empêchait pas évidemment pas, comme elle nous explique, l’ethnocentrisme -tendance à préférer le groupe auquel on appartient- d’exister auparavant ni les idées haineuses de prospérer. Mais il n’était pas mis au service d’un système de domination, voire du droit à tuer.
L’écrivaine montre de quelle manière il se traduit dans les choses les plus ordinaires du quotidien chez les individus racisés; un continent de discriminations qu’il est impossible de percevoir si l’on n’est pas concerné. A titre d’exemple, les chiffres du Défenseur des droits de 2020 cités par l’écrivaine témoignent ainsi du fait que l’on a “une probabilité vingt fois plus élevée d’être contrôlé par les forces de l’ordre” par rapport au reste de la population.
Inconsciemment ou pas, le racisme se niche aussi dans des comportements et des phrases que leurs émetteurs conçoivent comme positifs ( Les Noirs qui seraient “souriants et chaleureux”, qui excelleraient naturellement dans certaines disciplines sportives, les Asiatiques discrets et travailleurs etc...). Mais ils sont là aussi des moyens à la fois d’entretenir les stéréotypes et de différencier, donc d’exclure certaines catégories de personnes et donc de se placer en surplomb et pas sur un pied d’égalité. Comme se le demande ( et nous interroge) Rokhaya Diallo, vraiment, le racisme, ce sont donc uniquement les autres? En peu de pages, cet opus nous donne donc les outils pour conscientiser ce que nous faisons et disons, de manière à dialoguer sainement avec les petits et casser le cycle du racisme qui s’ignore...
Comment parler du racisme aux enfants, de Rokhaya Diallo, 12 euros, Editions On ne compte pas pour du beurre.