“Comment Marylin m’a sauvé la vie”, un ange gardien hollywoodien

Offrant une plongée dans l’intime, durant laquelle le drame et l’irrémédiable sont évités de justesse, puis relatant l’ascension sociale de son auteur, le premier roman de Régis Nkissi paru chez Grasset peut, grâce à un style sincère et sans fards, toucher un très large éventail de lectrices et lecteurs.

Par Patsy Monsoon

« C’est décidé, ce soir, je vais mourir, j’ai 14 ans et je vais mettre fin à mes jours. » Voilà un incipit qui secoue et happe le lecteur en quelques secondes. Il s’agit de celui du premier livre de Régis Nkissi qui, plus qu’un roman, est un récit autobiographique, aussi beau qu’émouvant.

Le livre peut être envisagé en deux parties. Dans la première, l’écrivain nous parle de lui, de ses journées à l’école ou en famille et du harcèlement moral auquel il est confronté, ponctué par l’interminable litanie d’insultes homophobes qu’il reçoit de la part de ses camarades de classe.

Lui, c’est un petit garçon qui habite dans un appartement situé dans une tour à Sedan et qui, en apparence, a tout pour être heureux. Il a cinq sœurs avec qui il s’entend bien, sa grand-mère avec qui il regarde des séries américaines, et ses parents, très affectueux, qui lui transmettent leur sens et leur amour de la mode. Car il faut dire qu’au Congo, la sapologie est un art de vivre et il est hors de question que les enfants sortent mal habillés dans la rue...

C’est justement cette passion qui va valoir au petit Régis les moqueries. Lui se sent séduisant, fort et invincible quand il arbore des vêtements de grands créateurs, ses belles chaussures et ses grands sacs. Mais cela n’inspire que de l’ironie aux autres, qui n’ont de cesse de le traiter de “pédé” alors que lui-même ne sait pas vraiment de quoi il s’agit.

Et cette violence quotidienne va le forcer à porter un masque, à ne pas montrer qu’il vacille, bien qu’il grandisse dans cet appartement joyeux où il y a toujours de la musique. Désespéré, il va alors vouloir sauter par la fenêtre. Heureusement, au dernier moment, aveuglé par le faisceau lumineux de la tour Eiffel, il va voir apparaitre son bon ange en la personne de Marilyn Monroe

S'ensuit un dialogue touchant. L’actrice américaine lui rappelle qu’elle aussi a beaucoup souffert dans sa jeunesse mais qu’elle n’a rien lâché jusqu’à devenir l’une des plus grandes légendes du cinéma mondial. Cela suffira à dissuader Régis de passer à l’acte et sèmera en lui les germes de son amour pour le grand écran.

Quelques années plus tard, il montera les marches du festival de Cannes et tournera dans des séries à succès. Une résurrection qu’il raconte dans la seconde partie du livre, solaire et joyeuse.

Nul besoin d’avoir connu le harcèlement pour être bouleversé(e) par ce livre universel, le parcours du comédien, sa sincérité, son écriture sans fioritures et les mots qui servent d’épilogue à Comment Marylin m’a sauvé la vie.

Et que dire des lettres qui l’émaillent ; celles que Régis a composées pour ses proches afin de leur expliquer son geste avant de sauter et leur dire adieu ? Ce sont autant des flèches qui visent en plein cœur. Empli d’autant de tristesse que d’énergie, d’espoir, d’amour de la vie et de positivité, cet ouvrage mérite sa place dans votre bibliothèque.

Comment Marylin m’a sauvé la vie de Régis Nkissi, 18,50 euros, Éditions Grasset

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