“Les Renaissances”, sur la route du retour à la vie
Dans son douzième roman, l’autrice à succès Agnès Martin-Lugand nous fait cheminer dans les pas de Rebecca, une écrivaine désertée par l’inspiration qui retrouve un second souffle, professionnel comme personnel, à la faveur d’une rencontre qui la chavire.
Par Géraldine Wiart
Il est des romans dont le titre nous anime d’un véritable espoir. Celui de pouvoir se laisser transporter. Des romans dans la lecture desquels on hésite entre ralentir pour ne pas avoir à aborder la dernière ligne ou à accélérer le rythme pour « savoir » le fin mot de l’histoire.... Distillant son intrigue sur pas moins de quatre-cent cinquante pages, le dernier opus d’Agnès Martin Lugand, Les Renaissances, écrivaine connue et reconnue pour ces personnages en quête de reconstruction, d’accomplissement, de choix de vie, fait partie de cette catégorie. Ceux des Renaissances, en quête d’une seconde chance, n’échappent pas à la règle.
C’est dans la solitude que s’ouvre ce roman. Puis le hasard fait se télescoper les trajectoires d’une romancière, Rebecca, que l’inspiration a fuie et dont la vie d’épouse « ne semble plus rien pouvoir lui apporter », et Lino, un artisan passionné de Venise qui est hanté par un amour révolu. Ce soir-là, au croisement de leurs existences, Lino livre une partie de son histoire à cette femme qu’il ne connait pas. Il est des échanges qui apportent de la surprise, une connexion fluide, et qui, sans le savoir, chamboulent les vies.
Après cette soirée, une folle envie, une folle idée naît chez Rebecca : retrouver Lino, parcourir la France, écouter la suite et déposer ce récit sur le papier. Deux défis sont alors à relever, Lino doit regarder son passé en accéléré et Rebecca, écrire sans jugements. La lectrice ou le lecteur navigue du regard de l’un à celui de l’autre. Parfois, les deux points de vue s’enchevêtrent. Chacun de ces héros doit affronter ses fantômes, pour ne pas passer à côté du moment présent et des opportunités qu’il offre, avec toutes ses contradictions.
La vie est un cycle. Et le titre prend alors tout son sens. Il est toujours possible de renaitre. Avec Lino et Rebecca, commence un apprentissage : apprendre à quitter ce qui est connu, accepter d’abandonner non sans mal- les repères dont on est las mais qui rassurent. Rebecca et Lino rappellent aux lecteurs l’importance de laisser aller ce qui n’est plus.
Mais dans Les Renaissances, le voyage n’est pas qu’émotionnel puisqu’Agnès Martin-Lugand nous embarque pour Venise, la Sérénissime, ses romances, ses ruelles, son art et ses loups de carnaval. Un saut au cœur de la cité italienne, de sa magie et ses mystères où pour un temps, il est permis de transgresser les règles, d’oublier les classes sociales et de se réinventer. Le cadre est parfaitement choisi. Pour nos héros, le moment est venu de « tomber le masque », de se délester des habitudes, des comportements sclérosés et d’admettre que ce qui a pu convenir autrefois se conjugue désormais à l’imparfait. Dans ce contexte, il devient facile et quelquefois douloureux, de s’identifier à eux...
Agnès Martin-Lugand nous promène à travers le temps, à travers les sentiments qui s’entremêlent, de la passion à la jalousie en passant par la trahison, la peur et l’envie. Attachants, ses protagonistes suscitent tantôt la compassion, tantôt l’agacement mais, à n’en pas douter, marquent les esprits une fois le livre refermé.
Les Renaissances, d’Agnès Martin-Lugand, 21,95 euros, Éditions Michel Lafon